
Cet article est la première partie d’une série qui interroge le rapport à la parole en fonction de notre genre. Avant de démarrer, n’oubliez pas de lire l’introduction :
[Les reines du silence] La prise de parole des femmes en 3 parties
Si c’est déjà fait, allons-y pour la partie #1.
Prendre la parole publiquement, à l’écrit ou à l’oral, est une opportunité d’occuper l’espace et ainsi transmettre son récit, son point de vue. La parole dans l’espace public est majoritairement distribuée en reconnaissance d’un certain statut, parce qu’une personne est considérée légitime à tenir le micro ou la plume. Cette légitimité est souvent explicitée par la fonction de la personne invitée à parler, par exemple en qualité d’expert·e par son métier ou de témoin. Des personnes considérées comme légitimes grâce à une forme de pouvoir qu’octroie un statut institutionnel (diplôme, métier, fonction) sont invitées à s’exprimer par des personnes ayant des espaces de parole disponibles (médias, conférences, assemblée politique). L’inverse est aussi vrai, avoir un espace de parole médiatique permet aux personnes de gagner en légitimité. Ainsi, chaque prise de parole leur permet de produire le pouvoir lui-même, définissant les sujets légitimes et la manière de les aborder. Puisque nous sommes là en présence d’une dynamique de domination assez classique, vous ne serez pas étonné·es d’apprendre que la parole publique est majoritairement occupée par les hommes, puisque considérés légitimes à exercer le pouvoir.
Parole médiatique et politique, pouvoir symbolique
Selon le rapport du CSA sur l’année 2019, le taux de présence des femmes à l’antenne, télévision et radio confondues, est de 41% et leur temps de parole de seulement 36%. Malgré les lois sur la parité en politique [1], les femmes avaient seulement 28% du temps d’antenne pour les élections européennes. Un compte Twitter, celui d’Anne Pédron, recensait au printemps 2021 les femmes invitées des matinales radio chaque jour : une moyenne autour de 30% de femmes. Quand les médias sollicitent une expertise, les femmes représentent seulement 38% des personnes interrogées. Il est des domaines médiatiques encore moins bien lotis : dans le sport, la parole des femmes, télévision et radio confondues, représente 13% du temps d’antenne.

Si les métiers les plus mobilisés durant la crise du Covid sont majoritairement féminins, les femmes ont pourtant vu leur temps de parole dans les médias encore diminuer. D’après une nouvelle étude du CSA, leur taux de présence a diminué de quelques points et le nombre d’expertes a chuté à seulement 20%. Un rapport sur la place des femmes dans les médias en temps de crise, commandé par Edouard Philippe en avril 2020 et remis par Céline Calvez, a évalué que dans les journaux, pendant le confinement, 83% des personnalités apparaissant à la Une sont des hommes et ceux-ci signent 74% des tribunes. La Une du Parisien du 5 avril avait mis en exergue cette prédominance, affichant 4 hommes qui « racontent le monde d’après ». Malgré cette demande d’un rapport émanant du Premier Ministre et la parité du gouvernement, l’exemplarité n’y est pas de mise. Le Conseil Scientifique constitué pour gérer la crise du Covid était composé à 80% d’hommes. Et pour la communication de crise, le devant de la scène est monopolisé par les hommes de l’exécutif : Emmanuel Macron, Jean Castex, Olivier Véran, Jean-Michel Blanquer. Si le monde d’avant est fait par des hommes pour des hommes, apparemment le monde d’après également puisque c’est toujours à eux qu’est confié le pouvoir de construire les récits collectifs.

4 hommes blancs pour imaginer le récit du monde d’après
S’occupant en réalité encore peu des tâches parentales et domestiques, ils ont également plus de temps disponible pour prendre la parole dans des conférences qui ont lieu sur le “temps privé”, soirs et weekends et étendent en réalité les plages de temps de travail au détriment de celles qui doivent prendre en charge le foyer et les enfants. C’est encore pire en temps de crise sanitaire, où la charge domestique explose : au printemps 2020, plusieurs revues ont déploré la diminution du nombre d’articles écrits par des femmes quand les publications proposées par les hommes augmentaient.
N’oubliez jamais qu’il suffira d’une crise politique, économique ou religieuse pour que les droits des femmes soient remis en question. Ces droits ne sont jamais acquis. Vous devrez rester vigilantes votre vie durant.
Simone de Beauvoir
Ces inégalités dans la prise de parole ont des impacts significatifs. Elles entretiennent l’exclusion du pouvoir de plus de la moitié de l’humanité et empêchent nos imaginaires de construire une vision différente de cet état de faits. Nous manquons à la fois de diversité des points de vue qui s’expriment, mais aussi de représentations permettant de changer cet état de faits, de role models pour s’imaginer être celle à qui on donne la parole.
Compétence, expertise et rationalité
A l’UTL (Université du Temps Libre) où ma mère est adhérente, le premier trimestre de la saison 2021/2022 accueillait 9 conférences. 10 intervenants au total, tous des hommes. Partout, sur tous les sujets, dans les tables rondes et autres panels de débat, une grande majorité d’hommes est invitée à s’exprimer et monopolise la parole. Peu importe la thématique abordée, les hommes sont considérés pertinents, par historique, par habitude ou par copinage. C’est comme s’il y avait un quota préexistant. Il y a là un effet de relais dans la transmission de la parole très bien exprimé par Lauren Bastide dans son essai Présentes, « Des rédactions dirigées par des hommes entraînent des rédactions composées d’hommes qui interviewent en priorité des hommes. » Les hommes occupent la majorité des positions en haut de la hiérarchie : en politique, dans les médias, dans les entreprises, en sciences, etc. Ces positions leur confèrent une présomption de compétence et d’autorité, les rendant légitimes à être sollicités pour parler de leur domaine d’expertise. Ils sont en réalité souvent sollicités également sur d’autres sujets pour lesquels ils hésitent peu à donner leur avis, même en l’absence de compétences spécifiques. Leur prise de parole alimente encore leur légitimité, les rendant aptes à être à nouveau interviewés.

Les femmes quant à elles sont cantonnées à être sollicitées quand les sujets les concernent spécifiquement, (et encore, c’est souvent l’endroit où il y a justement parité) : “les femmes dans la tech”, “être une femme entrepreneure”, etc. Ces thèmes, par leurs titres, ne semblent concerner que les femmes et le public est en conséquence majoritairement féminin. Les mêmes sujets, sous l’angle commun (être entrepreneur par exemple), sont considérés neutres du point de vue du genre mais reviennent le plus souvent aux locuteurs masculins. Les femmes se retrouvent encore une fois coincées dans cette position d’être le spécifique, l’exception, l’Autre. Cette position les exclut de fait d’un attendu fréquent dans tout type d’expertise : passer pour neutre et objectif. Dans les milieux scientifiques comme journalistiques, l’injonction à la neutralité et l’objectivité est particulièrement marquée. Conjugué aux stéréotypes de genre, qui confèrent aux femmes l’impossibilité de se défaire de leurs émotions, cet objectif de neutralité et de rationalité construit une structure où seuls les hommes peuvent atteindre la hauteur de vue et la raison nécessaires. C’est ce qu’explique Alice Coffin dans Le Génie Lesbien : « L’enseignement et l’histoire du journalisme leur ont appris que l’émotion, c’était le mal. Que pour débattre il fallait du rationnel, du froid, de la distance. L’expertise et le commentaire sont donc, de préférence, confiés aux hommes blancs. Les autres seront, au mieux, sollicitées comme témoins. » Un témoignage, c’est un point de vue duquel on peut s’autoriser l’émotion, parfait pour une femme donc. Les hommes blancs cis et hétéros quant à eux, peuvent se prévaloir de la neutralité, de l’universel, puisque n’appartenant à aucune des catégories spécifiques qui font l’altérité : ni femme, ni racisé, ni trans, ni gay. En réalité, eux aussi voient le monde depuis leur propre point de vue et ont tendance à ne traiter que leurs expériences et leurs problématiques propres. Se croire neutre crée des angles morts, alors que nommer la particularité d’un groupe permet d’en expliciter des points communs. Est-ce la confusion entre homme et Homme qui les amène à se penser universels et nier leur subjectivité ? A quand des réflexions sur les hommes dans la tech, les hommes entrepreneurs et comment les modèles de masculinité façonnent ces fonctions ?
Par ailleurs, les femmes qui prennent la parole publiquement s’exposent à de multiples formes de sexisme, plus ou moins visibles et immédiates. Dans le documentaire Je ne suis pas une salope, je suis une journaliste de Marie Portolano, les journalistes témoignent de la disqualification subie dès la moindre erreur. Leur expertise est niée, dans une forme d’incompétence indépassable. Nathalie Iannetta raconte avoir été prévenue par Thierry Gilardi « Moi, si je me trompe […], spontanément, les gens vont imaginer que je sais et que c’est un lapsus. Toi même si c’est un lapsus, et que tu sais, la première réflexion, ce sera toujours que tu n’y connais rien. » Commentaires sur leur physique et leur désirabilité, interruption sommaire, délégitimation sur la forme ou le fond, renvoyées à leurs émotions ou à leur absence d’objectivité, chaque prise de parole est une occasion de réassignation à la position de femme.
Des récits au masculin, un apprentissage au masculin
L’humanité transmet ses savoirs, son histoire, ses mythes et ses normes par les récits. La tradition orale s’est transformée avec l’apparition de l’écriture. Aujourd’hui, nos multiples formes d’arts nous permettent également de diffuser des récits, constituant ainsi une part importante de notre culture commune. Produire une œuvre artistique est une forme de prise de parole. L’art est un moyen de diffusion d’une pensée, particulièrement explicite quand il s’agit de l’écriture d’un livre, de la réalisation d’un film et de la parole de ses personnages ou de paroles de musique & les artistes célèbres ont en supplément un micro tendu dans les médias lors de la promotion de leurs œuvres.
Et là encore, les hommes sont plus que majoritaires, et par là même leur point de vue situé l’est également. Cette omniprésence masculine a de l’influence sur nos imaginaires, sur notre analyse du monde. Elle renforce notre androcentrisme. Si les femmes n’ont pas accès à la parole, nous n’avons pas accès à leur point de vue et à leur expérience.
Je n’ai pas mémorisé tous les livres étudiés pendant ma scolarité, parce que si j’aime beaucoup lire, je ne suis pas une grande adepte de ce qu’on appelle les classiques littéraires. En classe prépa, on étudiait une matière appelée Français-Philosophie, où le but était d’analyser chaque année un thème philosophique (Puissance de l’imagination en 1ère année & Penser l’histoire en 2ème année) au travers de 3 œuvres littéraires. Sur deux ans, j’ai lu Marcel Proust, Nicolas Malebranche, Miguel de Cervantès, François-René de Chateaubriand, Karl Marx et Pierre Corneille. Panel 100% masculin. Non seulement, seuls des hommes étaient habilités à nous parler d’histoire et d’imagination, mais en bonus, on a eu le droit à un superbe concentré de stéréotypes et de misogynie dans le tout premier chapitre du livre de Malebranche (le livre date de 1712) intitulé “De l’imagination des femmes”. Extrait : « Tout ce qui dépend du goût est de leur ressort, mais pour l’ordinaire elles sont incapables de pénétrer les vérités un peu difficiles à découvrir. Tout ce qui est abstrait leur est incompréhensible. » Et si, énervée par cette lecture, j’ai grogné jusqu’à la fin du livre, je n’ai aucun souvenir que dans son étude au long de l’année scolaire, les propos de Malebranche n’aient été remis en question à cause de cette partie de texte. Il est considéré normal qu’un penseur du 18ème siècle soit misogyne, et ça n’est pas un motif légitime pour critiquer ses propos outre mesure. Sa parole reste légitime, entendable, et même importante. D’ailleurs, Malebranche lui-même était explicite sur le traitement accordé à la parole des femmes comme celle des enfants : « Mais c’est assez parler des femmes et des enfants : ils ne se mêlent pas de rechercher la vérité et d’en instruire les autres : ainsi leurs erreurs ne portent pas beaucoup de préjudice, car on ne les croit guère dans les choses qu’ils avancent. » Comment penser que l’on traite aujourd’hui différemment la parole des femmes si l’on n’est pas capable de questionner celle des hommes qui nous ont délégitimées ?

Les œuvres de femmes sont donc assez absentes des programmes scolaires. En 2017, Mme de Lafayette a fait son entrée comme première autrice au programme du bac L. En 2021, sur les 80 et quelques philosophes à l’étude en terminale, on compte désormais 6 femmes : Simone de Beauvoir, Simone Weil, Jeanne Hersch, Elizabeth Anscombe et Iris Murdoch, qui se sont ajoutées à Hannah Arendt, seule présente au programme du bac 2020. En 117 ans d’existence du prix Goncourt, il a été attribué 12 fois à une femme, tout juste 10%. Il faut dire que son jury compte 3 femmes et 7 hommes à ce jour. La parité n’y est pas pour demain, et là encore, par copinage, par habitude, par historique, les hommes promeuvent des hommes qui racontent les aventures d’autres hommes. En effet, qui raconte les histoires a de l’impact sur les histoires qui sont racontées. « Le récit prisé est celui de l’homme, du héros masculin qui comme Ulysse fait son voyage, traverse mille épreuves, et en revient. » nous précise Alice Coffin.
Dans les films aussi, l’affiche et le temps de parole sont monopolisés par les hommes. A tel point que la dessinatrice Alison Bechdel a publié en 1985 un test en 3 questions pour montrer la sous-représentation des femmes dans un film : Est-ce qu’il y a au moins deux personnages féminins ayant un nom ? Est-ce qu’elles parlent ensemble ? Et est-ce qu’elles parlent d’autre chose que d’un homme ? Ce test étant très simple, répondre oui à ces 3 questions est bien loin d’être suffisant pour garantir un accès à la parole égalitaire, mais figurez-vous qu’encore aujourd’hui, près de 20% des films ne valident pas ce test (50% en 2009). Une recherche plus exhaustive autour du temps de parole a été menée sur de nombreux films américains, dont ceux ayant reçu l’Oscar du meilleur film de 1991 à 2016, le résultat va vous étonner (ou pas).

A la recherche des autrices perdues
C’est exactement ce monopole et cet envahissement par les hommes qu’a exprimé Alice Coffin dans Le génie lesbien : « Il ne suffit pas de nous entraider, il faut, à notre tour, les éliminer. Les éliminer de nos esprits, de nos images, de nos représentations. Je ne lis plus les livres des hommes, je ne regarde plus leurs films, je n’écoute plus leurs musiques. […] Les productions des hommes sont le prolongement d’un système de domination. Elles sont le système. L’art est une extension de l’imaginaire masculin. Ils ont déjà infesté mon esprit. Je me préserve en les évitant. Commençons ainsi. Plus tard ils pourront revenir. » Si elle a été très critiquée pour ces propos considérés comme excessifs, trop radicaux, relevant d’une guerre contre les hommes, elle énonce pourtant une réalité à laquelle nous sommes bien souvent aveugles : les arts, TOUS les arts, sont dominés par les hommes blancs. Ils sont les génies passés et présents, sont valorisés par l’essentiel des prix et occupent tout l’espace des musées. Vous comme moi, si l’on doit citer des artistes célèbres, sommes capables de nommer bien plus d’hommes que de femmes, que ce soit en littérature, en peinture, en musique ou au cinéma. Les femmes seraient-elles moins touchées par la grâce artistique ?
En réalité, revendiquer un point de vue dans les disciplines artistiques et accéder à un espace de parole est largement plus complexe pour les femmes et les personnes victimes d’autres discriminations. Elles ne sont pas mises en valeur, elles n’accèdent pas à la notoriété, ni à un statut leur permettant des revenus suffisants et restent ainsi moins crédibles que des hommes dans le même domaine. La hiérarchie des compétences est respectée. Là encore, comme dans les prises de parole médiatiques, la vision, les sujets, les propos des femmes sont renvoyés au spécifique, à la différence voire à l’infériorité. Les œuvres de femmes ne concerneraient que les femmes, tandis que les hommes ont le bénéfice de l’universel. On peut également « se demander comment la société fabrique des génies », comme l’expriment à propos de Picasso, Manon Bril sur sa chaîne C’est une autre histoire et Julie Beauzac dans le podcast Vénus s’épilait-elle la chatte?. Picasso était un homme particulièrement violent et misogyne, qui a commis de nombreuses violences et abus sur ses compagnes et ses amis au cours de sa vie. Au prix de combien de vies détruites l’a-t-on érigé au rang de génie ? Combien de Dora Maar ont vu leur œuvre occultée et/ou leur carrière interrompue car renvoyées au rang de muse passive pour l’inspiration du génie, brisées par un conjoint violent ou assignées au rôle de soin d’un conjoint ou d’un autre membre de sa famille ?
Accéder à la parole et au point de vue des autrices, des musiciennes, des sculptrices, des réalisatrices, des peintresses nécessite un effort conscient et conséquent qui nous permettra sans doute de défaire, brique après brique, l’androcentrisme de nos regards.

Compter pour rééquilibrer
L’histoire est une discipline qui se base sur les témoignages. On dit souvent que l’histoire est faite par les vainqueurs. Au vu de la domination de leur parole, il est certain qu’elle est faite par les hommes et on pourrait préciser qu’elle est faite par les dominants, à l’échelle de toutes les relations de pouvoir (genre, classe, race), par ceux dont la parole est diffusée et transmise. Limiter l’accès à la parole des femmes les empêche de participer aux débats donc aux décisions politiques, de faire compter leur voix et leur point de vue.
Je vous propose d’analyser vos dernières lectures, sur l’année 2021 par exemple. Quelle proportion des livres que vous avez lus étaient écrits par des femmes ? Selon nos stéréotypes, la littérature écrite par les femmes aborderait majoritairement des thèmes comme la romance, les relations, le corps, thèmes considérés peu importants voire niais. Est-ce que vous vous sentez atteint par ces préjugés du roman de plage ? Au cinéma, Julia Ducournau a obtenu cette année, pour son film Titane, la seulement 2ème Palme d’Or attribuée à une femme. Dans les derniers films que vous avez vus, combien ont été réalisés par des femmes ? Combien de femmes dans votre playlist musicale préférée ? C’est un effort à faire que de s’atteler à écouter les femmes puisqu’elles sont invisibilisées. Pourtant, elles sont là, elles composent 50% de la population et sont nombreuses dans les domaines artistiques. Faire la démarche de les connaître, de les lire et de les écouter, c’est justement un moyen de lutter contre la domination masculine et de faire évoluer votre point de vue vers un peu moins d’androcentrisme. Pour vous inspirer, de nombreux collectifs féministes travaillent à la visibilité des femmes comme Women who do stuff, La Poudre ou encore les sans pagEs.
Compter pour savoir de qui on écoute la parole est indispensable pour ne pas être aveugles au genre. Ne pas le faire, dans la situation actuelle, c’est maintenir le quota d’hommes, donc la domination. Il faut des démarches volontaristes, en partie déjà à l’œuvre dans les médias. Laurence Bloch à Radio France et Delphine Ernotte à France Télévisions en ont fait leurs chevaux de bataille. Les collectifs La Barbe et Jamais sans Elles ont pour objectif de dénoncer le monopole de la parole des hommes dans les événements publics et les médias.
En tant que responsable d’un événement ou d’un média, assurez-vous de la parité des interventions – ou à minima, de la représentativité par rapport à la population de départ : un événement d’ingénieur·es devrait toujours voir au minimum 30% d’intervenantes. Des initiatives comme Les expertes permettent d’accéder à une base de données de femmes spécialistes : https://expertes.fr/. Messieurs, quand vous êtes invités à intervenir, refusez l’invitation s’il n’y a pas de femmes dans le panel prévu et proposez à votre place une femme qui pourrait intervenir – de nombreux hommes se sont déjà engagés à le faire. A toutes et tous : choisissez attentivement de qui vous relayez la parole sur les réseaux sociaux (j’ai récemment interpellé un ami pour un post sur les questions climatiques et écologiques car il invitait à suivre 5 hommes et zéro femmes) et refusez de promouvoir un événement au panel entièrement masculin. Enfin, dans les domaines culturels et artistiques, intéressez vous au genre des artistes pour rééquilibrer vos bibliothèques, vos playlists et vos références cinématographiques.

Si cette première partie montre que la parole est monopolisée par les hommes, la partie #2 explore comment notre perception de cette parole est biaisée en fonction du genre du locuteur ou de la locutrice :
[Les reines du silence – Partie #2] Bavardes, vraiment ?
[1] Depuis juin 2000, les partis politiques sont contraints de présenter un nombre égal d’hommes et de femmes pour les élections régionales, municipales, sénatoriales et européennes.↩
3 commentaires sur « [Les reines du silence – Partie #1] Les hommes racontent l(es) histoire(s) »