Une femme sur deux est un homme. Langagez-vous pour l’égalité ! [2ème partie]

Ceci est la deuxième partie de l’article. Pour lire la première partie et tout savoir de mon goût pour les dictées, de l’apprentissage du genre grammatical et de la féminisation des noms de métiers, c’est par ici.

Liberté, Égalité, Sororité 

Je l’ai déjà dit, je suis une femme. Mais puisque « Un homme sur deux est une femme », suis-je aussi un homme ou même un Homme ? Voilà bien l’un des masculins génériques qui m’irritent le plus : homme. En 1948 est adoptée par l’assemblée générale de l’ONU, la DUDH : Déclaration Universelle des Droits de l’Homme à Paris, au Palais de Chaillot – palais qui abrite d’ailleurs le Musée de l’Homme. Aujourd’hui, la grande majorité des pays du monde ont transformé l’intitulé de cette déclaration pour parler de droits humains. Mais pas la France, qui résiste encore et toujours à l’envahisseuse… Pourquoi cette résistance ? Par fierté, puisque la DUDH est directement héritée de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, de la Révolution Française. J’en ai déjà parlé ici, la déclaration de 1789 réservait ses droits aux seuls hommes (spécifique ici, de sexe mâle). Mais aujourd’hui on oublie tout, l’Homme, surtout avec un grand H, serait générique et inclurait forcément les femmes. D’accord, le terme vient du latin Homo qui décrit l’espère humaine, mais il est hypocrite de prétendre que cela n’a pas d’impact sur nos représentations. En réalité, quand on parle du genre Homo, les images figurant le phénomène de l’évolution sont toujours celle d’un individu mâle. L’Homme de Vitruve, le célèbre dessin de Léonard de Vinci, s’appelait originellement « Étude de proportions du corps humain selon Vitruve » : le corps humain est donc uniquement celui d’un homme. Et Lucy est-elle un Homme préhistorique ?

Une recherche Google Images “image évolution humaine”

L’homme inclut l’homme et la femme, mais la femme n’inclut jamais l’homme, malgré la volonté mise dans le titre de cet article. Cet homme pseudo-générique pourrait presque devenir une définition des inégalités de genre. Pire, femme porte bien un double sens : on utilise le même mot pour parler d’une personne de sexe ou de genre féminin et comme épouse. Le même phénomène existe avec le terme de fille, enfant du genre féminin et fille de ses parents. Le même mot définit à la fois la personne et sa relation à un homme, mari ou père. Un homme peut être un mari et un garçon, un fils, mais ce sont des mots différents qui les définissent en tant qu’individu ou dans leur relation aux autres. Je propose donc que collectivement, on arrête de dire Homme pour parler des hommes et des femmes. On peut parler de l’humanité, des êtres humains, des droits humains. C’est simple, tout le monde connaît et comprend.

Dans la même veine, on a un problème avec la devise nationale, instituée comme devise de la IIe République en 1848 : Liberté, Égalité, Fraternité. La fraternité, ça inclut qui ? Est-ce qu’on est fraternel avec des sœurs ? Dans quelle mesure considère-t-on ce principe fondamental comme s’appliquant réellement à toutes et tous ? Comme l’explique la politologue Réjane Sénac, dans sa conférence TedX, « Si la devise ne s’adressait pas aux frères mais aux sœurs et s’énonçait “Liberté, Égalité, Sororité”, je pense que vous seriez nombreux à penser que la sororité ne représente ni l’universel, ni la neutralité ». Sachez que les termes d’adelphes et d’adelphité sont les termes épicènes adaptés, qui ont le chic des racines grecques, si l’on aime l’élitisme de la langue. Pour la devise nationale, Réjane Sénac revendique plutôt Solidarité, qui aurait un sens plus transparent et sortirait du registre de la famille.

Dans le langage institutionnel, on peut citer d’autres termes assez explicites sur la structure de notre société. Le pater, père en latin, nous a donné pléthore de mots lourds de sens. La patrie est étymologiquement la terre de nos pères. Le patriotisme est la défense, souvent virile et viriliste, notamment via la guerre, de cette terre des pères. Le patrimoine, en latin ce qui est relatif au père, est l’héritage que l’on transmet, en réalité via la filiation masculine uniquement. Le patronyme est le nom du père, que l’on transmet là aussi dans la filiation, effaçant du même coup les noms des mères. L’hommage était une promesse de fidélité d’un homme à son seigneur au moyen âge, définissant par son étymologie une relation entre hommes. L’école maternelle quant à elle, est l’institution qui remplace la mère dans l’élevage des enfants. Aux hommes, le monde public et aux femmes la charge de reproduction. Certains de ces mots changent aujourd’hui progressivement de sens (patrimoine ou hommage) ou sont moins usités (patrie) mais restent témoins d’une certaine vision du monde que l’on véhicule toujours.
Pour commenter la stratégie vaccinale du pays contre le Covid-19, notre ministre de la Santé Olivier Véran a récemment affirmé « Nous sommes en train de gérer les stocks en bon père de famille ». Si cette expression du bon père de famille est obsolète à la plupart de nos oreilles aujourd’hui, elle apparaissait dans différents articles de la loi française jusqu’en 2014, quand la loi sur l’égalité réelle l’a fait définitivement disparaître. Patriarcat et paternalisme sont toujours bien présents au sommet du pouvoir. En juillet 2020, Emmanuel Macron a défendu la nomination de Gérald Darmanin au poste de ministre de l’Intérieur malgré plusieurs accusations de viols en disant « il y a aussi une relation de confiance, d’homme à homme, de président de la République à ministre nommé ». Maladresse ou provocation ? Je ne me prononcerai pas, mais dans un moment clé pour agir politiquement contre les violences sexuelles « grande cause du quinquennat », c’est tout un imaginaire viriliste qui se déploie. Si depuis #MeToo en 2017, la parole des femmes semble de plus en plus écoutée, celle des hommes continue clairement à avoir plus de valeur.

Il y a une couille dans le potage

Pour continuer sur les expressions, petit florilège de perles entendues au travail : « Maëll, il va falloir y aller avec la bite et le couteau, poser ses couilles sur la table, avoir des couilles ». Non, non, je ne rigole pas, pas toutes les 3 le même jour bien sûr, mais. C’est comme si oser, s’imposer m’était inaccessible sans attributs virils. Avoir de la chatte par contre, c’est de la chance, plus question de compétences quand on est une femme. Un jour à table, un manager a dit « Les femmes sont toutes hystériques. D’ailleurs, hystérie vient d’utérus. » CQFD. Freud, sors de ce corps, bannis l’hystérie de ton vocabulaire, et laisse les femmes être en colère sans qu’il n’y ait de lien avec leurs organes génitaux.

Nos manières de désigner les femmes sont aussi parlantes, avec peu ou pas d’équivalences pour le masculin. On a déjà parlé ici du piège de garçon manqué. Dans le vocabulaire familier, soit on les infantilise : fille est utilisé familièrement pour désigner une femme – souvent comme équivalent de mec – alors que le mot désigne théoriquement une enfant ; soit on utilise des mots péjoratifs : nana, gonzesse, zouz, nénette. On a le droit aussi à un peu d’animalisation dans les insultes : poule(tte), dinde, chienne, cochonne, (grosse) vache. Et puis, vous reprendrez bien un peu de slut-shaming (toutes des salopes) : garce, coureuse, courtisane, femme facile, maîtresse… Il y a une vieille “blague” à ce sujet mise en musique en 2007 par Fatal Bazooka. Tout ça ne s’arrête jamais, puisqu’avec l’âge, on gagne la possibilité d’être une vieille fille ou encore une vieille peau. On pourrait continuer très longtemps comme ça. Toutes ces expressions si courantes montrent à quel point notre langage traduit (trahit) notre façon de penser. Nous sommes sexistes (oui, nous toustes, collectivement et structurellement, même inconsciemment, par héritage historique notamment), donc notre langage exprime ce mode de pensée et s’en rendre compte, l’identifier, c’est se donner la capacité de changer. 

Définitions données par Google. Le Wiktionnaire emploie le qualificatif de “vieilli” pour cette définition d’entraineuse.

Il en est d’ailleurs de même pour d’autres discriminations qui s’expriment dans le langage. La binarité du genre en français rend plus difficile l’expression des personnes non-binaires qui se tournent vers de nouveaux pronoms comme iel ou ael. Certains de nos mots ou expressions reflètent une vision pleine de stéréotypes racistes comme parler chinois, l’ustensile de cuisine que nous appelons chinois parce qu’il est pointu ou encore le téléphone arabe. Les insultes basées sur des handicaps ou des maladies, comme autiste, démontrent quotidiennement notre validisme. On pourrait enfin s’épargner de présupposer l’hétérosexualité de n’importe quelle personne à qui l’on s’adresse en usant de mots ou de tournures épicènes comme partenaire ou couple.

Penser l’égalité pour la dire et l’écrire

Parler ou écrire, c’est traduire sa pensée en mots, pour transmettre des idées vers les autres. C’est aussi par le langage qu’on pense : c’est parce que je peux exprimer quelque chose que je le pense. Pour celles et ceux qui lisent ou écoutent, mon langage induit des représentations et alimente leur pensée à son tour. 

« Il y a interaction entre langage et pensée. Un langage organisé agit sur l’organisation de la pensée, et une pensée organisée agit sur l’organisation du langage. »

Ahmad Amin

Réfléchir à ma manière de parler et d’écrire, choisir d’utiliser un langage non-sexiste, c’est essayer de véhiculer des représentations égalitaires, au plus près de la pensée initiale. Comme l’explique Eliane Viennot, le langage est un endroit où l’on peut agir individuellement vers l’égalité femmes-hommes, un outil assez simple à utiliser – même si on n’y arrive pas toujours, nos réflexes étant bien ancrés. On n’a pas à attendre un grand pas collectif, ni même à avoir l’assentiment de qui que ce soit – et c’est d’ailleurs ce qui pose problème aux plus réticents. Nombre de détracteurs de l’écriture inclusive s’offusquent qu’elle serait de « l’idéologie » : alors oui. Je ne sais pas pourquoi idéologie est devenu un mot si péjoratif, mais tout discours transmet des idées, une vision du monde et est donc fondamentalement idéologique : le mien quand je tente de visibiliser les femmes et d’éviter tout sexisme, autant que celui de l’Académie quand elle qualifie de péril mortel l’écriture inclusive ou assure que le genre masculin est plus noble.

Dans cet article particulièrement synthétique sur la controverse actuelle (que je référence plusieurs fois ensuite), des linguistes clarifient la définition de ce qu’est l’écriture inclusive, « dite aussi écriture épicène (en Suisse et au Canada), écriture non sexiste ou écriture égalitaire, [elle] représente un ensemble de techniques qui visent à faire apparaître une égalité, ou une symétrie, entre les femmes et les hommes dans les textes et à adopter un langage non discriminant par rapport aux femmes. » Si cette controverse est très vivace actuellement et se concentre sur l’écriture, elle est en fait loin d’être nouvelle et le langage inclusif est aussi un sujet à l’oral. De Gaulle est le premier homme politique à employer l’expression « Françaises, Français » pour parler aussi aux femmes, ayant nouvellement le droit de vote. L’académie, via Jean Dutourd, n’a pas oublié de pester un peu plus tard contre cette « manie ridicule ». Cette stratégie du doublon permet d’activer la représentation d’un groupe mixte pour un pluriel générique comme celui-ci ou dans « Bonjour à toutes et à tous ». Elle est aussi efficace dans le cas d’un singulier pour une personne dont on ne connaît pas le genre : l’auteur ou l’autrice, la ou le journaliste et utilisable également avec les pronoms : celles et ceux, elles et ils. Aussi bien pour des raisons de style et de phonologie que pour tenter de sortir de la binarité de genre, certaines personnes n’hésitent pas à créer des néologismes par contraction : toustes, celleux, iels. Pour éviter certains doublons, on peut aussi avoir recours à des structures de phrase épicènes, c’est-à-dire dont la forme ne varie pas selon le genre ou qui recouvre les deux genres. C’est le cas d’une personne, un individu, des gens, ou encore le lectorat, la magistrature, la classe politique, le personnel soignant mais aussi des structures passives Le cours de yoga est à 19h (au lieu de Ils et elles ont cours de yoga à 19h) ou Un gâteau a été fait (au lieu de Quelqu’un·e a fait un gâteau). 

Tous ces substantifs génèrent bien sûr des accords sur les adjectifs et les participes passés. Pour les partisan·es de l’écriture inclusive, les règles d’accord à préférer sont la règle selon le sens, i.e. en fonction du mot le plus important, ou la règle de proximité, en fonction du mot le plus proche. La règle de proximité est particulièrement adaptée aux doublons. « En revanche, des études scientifiques montrent que l’ordre choisi pour présenter chaque élément de la paire (« les boulangères et les boulangers » vs « les boulangers et les boulangères ») a un effet sur l’interprétation : l’élément présenté en premier est perçu comme plus central ou plus important. » Personnellement, j’essaie d’appliquer une règle simple d’énumération dans l’ordre alphabétique. C’est la raison pour laquelle je dis et j’écris l’égalité femmes-hommes et non l’inverse. Nous avons plutôt pour habitude d’employer le masculin en premier lieu, marque encore une fois de la vision de l’homme comme standard, comme référence et la position des femmes en tant qu’altérité. L’exemple le plus courant se trouve dans les offres d’emploi qui ont l’obligation de non-discrimination. On y trouve le plus souvent le fameux (H/F), même si de plus en plus d’offres sont rédigées de manière inclusive, souvent avec des termes épicènes ou des doublons. Contrairement à Pôle Emploi, le site de l’APEC utilise l’ordre alphabétique (F/H).

Dans les titres d’offres d’emploi (Pôle Emploi et APEC), beaucoup de masculin générique, un usage des doublons masculin et féminin, quelques termes épicènes et un peu de féminin générique – 04/02/2021

Le point médian, cristallisation des conflits 

A l’écrit, la stratégie du doublon peut alourdir un texte et requiert donc l’usage d’abréviations. C’est là que le bât blesse. Si nous avons depuis plusieurs dizaines d’années reçu des courriers commençant par « Cher(e) étudiant(e)/collègue/client(e) » et nos cartes d’identité indiquent « Né(e) le » sans choquer grand monde, depuis 4-5 ans c’est plutôt le point médian (ou point milieu) qui a les faveurs de l’usage. Il est préféré à la parenthèse “()” qui connote ce qui s’y trouve comme ayant une moindre importance, mais aussi au point standard “.” qui reste réservé aux fins de phrases et d’abréviations ainsi qu’au tiret “-” qui visuellement découpe plus les mots. Un défaut pratique : pour l’utiliser, il faut aller le chercher dans les caractères spéciaux, le copier d’un autre texte ou utiliser un raccourci clavier assez complexe.
Ce point médian, que j’utilise dans tous mes articles sur ce blog, cristallise les conflits sur une écriture inclusive qui en deviendrait illisible, menaçant même la langue française d’un « péril mortel » selon l’Académie Française. Récemment, suite à la publication d’un papier par un ami utilisant l’écriture inclusive et le point médian dans un petit journal obscur d’anciens élèves, une pluie de réactions outrées a fait rage. L’un des mails reçus avait pour objet : « Écriture dite « inclusive », même ici… ». Comment ça même ici ? Oui, même ici, dans les bastions masculins que sont les écoles d’ingénieur·es, les femmes existent. Dans un projet de mixité en entreprise, j’ai utilisé ces points médians dans quelques présentations et là également, la réaction ne s’est pas faite attendre, les directeurs s’inquiétant que je les force à utiliser cette écriture compliquée (et inutile cela va sans dire). Avais-je vraiment le pouvoir de les forcer à faire cette chose si horrible ? Absolument pas. Sincèrement, je m’interroge : pourquoi ces réactions si rapides et si violentes pour un féminin apparent dans une convention d’écriture ? Pour moi, rendre visible ce féminin, c’est rendre visible les femmes. Pourtant, je n’ai jamais forcé personne à l’utiliser, même si ça semble souvent être la crainte de mes interlocuteurs (masculin spécifique). Ont-ils peur d’une forme de soumission à un ordre social qu’ils ne désirent pas ? Bienvenue dans mon monde. Pourquoi ce qu’ils qualifient de “gesticulation” les fait tant sortir de leurs gonds ?

Cela dit, l’usage du point médian peut réellement créer des difficultés de lecture. Sur une population d’étudiantes et d’étudiants, une étude a mesuré « un léger ralentissement de la lecture (…) à la première apparition de ces formes, mais (elle) se normalisait ensuite. Pour autant, on ne peut pas conclure de cette étude que l’effet serait identique, ou différent, pour d’autres populations. Et les raisons de l’effet de ralentissement, comme de l’effet d’habituation, ne sont pas encore réellement connues. » D’après d’autres retours, une « impossibilité de prononcer » les termes en question poserait également problème, particulièrement dans le cas de structures plus complexes comme lecteur·trices ou chercheur·euse. Personnellement, je ne crois pas prononcer les mots quand je lis pour moi, ni en lisant d’autres abréviations comme av. J.-C, Dr, km/h ou encore n°, mais il semble que les manières de lire soient différentes selon les personnes et les situations. Si je devais le dire à voix haute, ce serait lecteurs et lectrices et chercheur ou chercheuse. Enfin, l’accessibilité des textes en écriture inclusive aux personnes atteintes de handicap est aussi un enjeu. Les personnes aveugles utilisent des lecteurs d’écran (logiciels de synthèse vocale) et ceux-ci commencent tout juste à prendre en compte le point médian maintenant que son usage se répand. Espérons que cette démocratisation continue. Pour les personnes souffrant de troubles “dys”, l’impact du point médian est encore peu étudié et les témoignages assez divergents. La plupart des recommandations demandent de limiter autant que possible l’utilisation de ce point médian en priorisant les autres modalités d’écriture inclusive en particulier pour les textes destinés aux enfants. 

Si les débats autour de ces graphies sont si prégnants, c’est que de plus en plus de personnes s’approprient l’expérimentation d’un langage plus inclusif mais avec des usages encore assez peu stabilisés. Se pose d’ailleurs la question de l’écriture de ces abréviations, les conventions n’étant pas encore complètement établies : où fait-on la reprise pour la seconde terminaison chercheur·se, chercheu·r·se, chercheur·euse ? La lecture me semble plus fluide avec cette troisième proposition. Une autre solution pour contrer ces difficultés, spécifiques aux noms dont la terminaison est très différente au masculin et au féminin, peut aussi passer par des propositions de néologismes comme lecteurices (acteurices, auditeurices, dessinateurices…) ou chercheureuse (professeureuse, développeureuse, footballeureuse…). Il est vrai que cela complexifie les phases d’écriture, mais dans des métiers trustés par les hommes ou des situations stéréotypées, forcer la visibilité des femmes dans les représentations a un véritable impact. Pour ma part, apprendre à transformer mes pratiques écrites et orales est un nouveau jeu de vocabulaire et de formulation. Cela force quiconque voudra accéder à mes propos à subir ce langage – et donc, je l’espère, avoir un impact sur ses représentations, les faire évoluer. Je ne sais pas quelle est la meilleure solution entre l’usage des points médians, plus courte, la version doublons, l’utilisation d’un féminin générique ou la tentative de création de néologisme qui s’absolvent de la question du genre. Aujourd’hui toutes ces pratiques cohabitent dans les usages, en fonction des personnes mais aussi des situations orales ou écrites, textes publics ou non, type de destinataire, enjeu du message, etc. De nombreux guides sont disponibles en ligne pour guider ses propres usages dont voici quelques exemples : cet état des lieux des sciences linguistiques, les préconisations d’Eliane Viennot autrice de nombreux ouvrages et articles sur le sujet ou encore des pistes pour l’accessibilité aux personnes dyslexiques ou utilisant des lecteurs d’écran. Pour simplifier l’utilisation du point médian, une personne a développé des extensions pour les navigateurs Internet, pour chercher d’autres solutions de graphie, quelqu’un a dessiné une nouvelle typographie. Les initiatives sont multiples et ces expérimentations me semblent être un bel exemple d’intelligence collective pour aller vers les meilleures réponses possibles aux différents besoins. 

Changer l’orthographe ne suffira pas à faire disparaître le sexisme, mais puisqu’aujourd’hui notre langage perpétue nos représentations sexistes, ne rien changer c’est maintenir notre vision oppressive. Dans une démarche globale vers l’égalité entre les femmes et les hommes, il semble acquis que changer nos mentalités nous amènera à changer notre langage, le plus flagrant étant que le masculin ne pourra plus l’emporter sur le féminin. Jouons avec la langue française et commençons dès aujourd’hui.


Si le sujet des sciences du langage vous passionne, quelques ressources utilisées pour cet article :


3 commentaires sur « Une femme sur deux est un homme. Langagez-vous pour l’égalité ! [2ème partie] »

  1. Bravo Maëlle pour toute cette recherche.
    Il y aurait aussi tout un autre champ à explorer : comment savoir si la non prise en compte d’une idée, d’une proposition dans un groupe est liée au fait que ce soit une femme qui la fait ou si c’est plus lié à la confrontation des idées ? Quelque soit le groupe : professionnel, associatif et même famille, couple.

    Aimé par 1 personne

    1. Merci Anne Marie !
      C’est un sujet très intéressant que la question de la prise de parole et de son écoute (ou non), il y a effectivement beaucoup à dire. Sous l’administration Obama, les femmes avaient adopté ce qu’elles ont appelé la stratégie de l’amplification pour se faire entendre : http://www.slate.fr/story/123511/femmes-gouvernement-obama-strategie-reunion
      Merci pour la proposition, je me le note pour un prochain article.

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